Delphis/Lucina || I challenge my fate !

Une héroïne du temps.

Telle est Delphis – ou plutôt devrait-on dire Lucina, fille de Chrom, prince d’Ylisse, et donc, par la même occasion, descendante de l’Exalt ? En soit, une jeune princesse ayant voyagé dans le temps, et ce dans le but de sauver sa nation – que dis-je, le monde. Une belle présentation de bravoure, de courage, et, surtout, de loyauté envers son peuple – envers le monde.

Un physique gracieux, féminin et agréable à la vue, contrastant un regard sérieux et déterminé, à la volonté de fer. Un parler respectueux, poli, modeste, faisant, lui, opposition à une force d’esprit et à un instinct de survie hors du commun. Tant de contradictions, qui ne sont que le résultat d’une vie remplie d’obstacles, dont les épaules ne doivent cesser de soutenir le destin d’un monde entier. Il faut dire que Lucina, contrairement à de nombreuses demoiselles de la noblesse ou de la royauté, n’a jamais pu profiter de toutes ces coquetteries que l’on attribuerait souvent à son rôle. C’est en cela que, bien qu’elle ait à maintenir une stature digne d’une personne de son titre, il lui faut aussi porter le devoir d’un guerrier : d’être sérieux, réaliste, sans laisser place aux plaisirs simples de la vie ; ne vivant que pour pouvoir, un jour, vivre dans un monde meilleur. Même si ce jour, où elle viendra à hériter du trône d’Ylisse et à restaurer sa nation ne viendra jamais … Étrangement, ce titre, ce rôle, reste malgré tout gravé en elle, est une part de son identité. Un peu comme la marque d’un échec passé – mais qui n’arrivera jamais.

Peut-être est-ce pour cela que la jeune adulte, ayant à peine plus d’une vingtaine d’années, reste particulièrement modeste et, surtout, peu sûre d’elle, doutant de ses capacités. Si son père qu’elle admire tant, qui fait la fierté d’Ylisse, échoue … De quoi serait-elle capable, elle ? Sera-t-elle meilleure que son père, héritant de ses qualités ? Ou décevra-t-elle les attentes de tous, ne pouvant arriver à la cheville de son prédecesseur ? Lucina est, parmi tant d’autres, un de ces enfants écrasés par l’image parfaite de leurs parents, desquels on attend beaucoup, inconsciemment ou non. Forte, courageuse, capable, volontaire, loyale, douée à l’épée, digne de la marque de Naga, du nom de Chrom, de Marth … Tant d’attentes, qui n’aident pas dans les doutes de l’héritière. Il n’y a aucune place pour les défauts, alors que, pourtant, celle-ci reste, derrière tous ces titres de “princesse”, “héritière”, ou encore “héroïne du temps”, “Celle Qui Connaît Le Futur” … une simple humaine.

Et ce à commencer par le fait derrière toutes ces images qu’il faut maintenir, Lucina reste, en vérité, particulièrement maladroite, avec son lot de défauts. Il lui est difficile de comprendre une blague, ou même de savoir s’il faut en rire ou non ; de même que ses goûts, notamment vestimentaires, sont pour le moins … inhabituels. A force de devoir se présenter comme une figure royale digne, ou une guerrière à la lame redoutable, Lucina connaît nullement les termes de “loisir” ou de “repos”. Ses goûts restent alors particulièrement basiques, ou même tout simplement peu développés : la faisant aimer, apprécier énormément de choses ; encore plus si c’est en lien avec ce qu’elle aimait, ou connaissait déjà. Oui … Comme un enfant : naïf, innocent, ne se doutant de rien.

Même si Lucina est une adulte, avec un sens des responsabilités louable, et un réalisme impeccable, celle-ci reste, finalement, une enfant – qui, malheureusement, a dû grandir bien trop vite pour survivre dans ce monde injuste. Bien qu’elle connaît et est capable de beaucoup de choses, sa façon de penser, ses doutes, ses goûts, ses intérêts, sa curiosité : tout est enfantin : car, en défendant le monde, elle n’a pu prendre le temps de le découvrir.

Assez étrange et contradictoire, pour quelqu’un qui voyage dans le temps, non?

Ruine, chaos, anarchie, … Tant de termes pour décrire le monde, l’époque dans lesquels Lucina a vu le jour.
Fille de Chrom, prince d’Ylisse, et Olivia, danseuse originaire de Ferox ; également la soeur aîné d’un petit frère au doux nom d’Inigo. Un avenir prometteur pour la jeune fille, voilà ce à quoi l’on pouvait s’attendre en voyant sa beauté, autant extérieure qu’intérieure, ajoutée à ses capacités loin d’être négligeables. Un avenir prometteur pour Ylisse aussi, par conséquent.

Une descendante de la lignée royale. Lucina avait donc accès à tout ce qui était possible en ce monde, en l’échange du devoir de guider le peuple. Une chose qu’elle ne refusa pas ; et que, de toute, elle n’aurait pu refuser. Cela dit, cet échange, qui serait comme une opportunité pour beaucoup, était, à ses yeux, un honneur. Raison pour laquelle la jeune fille, dès son plus jeune âge, faisait de son mieux pour sa nation, son peuple. Jamais elle ne faillit ; jamais elle ne laissa tomber son rôle, et gardait la tête haute, du mieux qu’elle pouvait.


Même lorsque Grima, le dragon déchu, fit surface.
Même lorsque le monde sombra petit à petit dans les ténèbres et le désespoir.
Même lorsque ses parents perdirent la vie.
Même lorsque Falchion, seul souvenir restant de son père, lui fut confié …

Pouvait-on seulement donner un nom à la douleur que l’héritière put ressentir, alors que le monde s’écroulait autour d’elle, que le doute sur ses capacités la prenait, que sa responsabilité pour corriger tout cela montait de jour en jour ? Chaque jour était un combat ; chaque heure était emplie de peur ; chaque minute, chaque seconde comptait. Un long combat dont Lucina ne pouvait en voir le bout, accompagnée des autres enfants, seuls survivants de l’armée des Veilleurs.

Mais l’espoir qu’était le leur ne suffisait ; aussi, après tant d’années, après tant de combats, ne restait-il que ces mêmes enfants, le dragon déchu et des terres désolées. Contrairement à tous ces contes de fées, dans lesquels la justice gagnait toujours à la fin, ici il n’en fut rien. C’en était fini …


.. Jusqu’à ce que Naga, le dragon divin, se présenta à eux : offrant une nouvelle chance aux enfants, à Lucina. Un voyage dans le temps, dans le but de changer l’histoire. Une idée qui redonna l’éclat à leur espoir, et qui, malgré quelques hésitations de la part de certains, fut appliquée.

Des préparations eurent lieu : durant lesquelles l’anonymat de Lucina fut décidé. Ce fut Gerome qui proposa les masques, afin de cacher son visage – mais aussi plus particulièrement la marque de l’Exalt à son oeil. Lucina voulut opter pour une paire de lunettes – le problème étant que celles-ci pouvaient être particulièrement hideuses. Finalement, c’est lorsque Severa s’opposa – avec un dégoût non dissimulé – à un tel choix, en proposant un masque de papillon, que la princesse changea d’avis. Pour peaufiner sa couverture, on vint même à l’éventualité de la travestir ; il fallait bien avouer que Lucina avait un physique androgyne ; aussi pouvait-elle être aussi féminine que masculine. Sa voix également était parfaite pour ce rôle ; suffisamment grave pour pouvoir passer pour un homme.

On lui confia alors des vêtements d’homme ; tressa ses longs cheveux, pour ensuite les arranger de sorte à ce que l’on pense que ces derniers sont courts – les couper auraient été un gâchis. Enfin, elle porta son masque : le résultat fut bien plus que correct. N’inspirant pas tant la virilité, sa couverture restait tout de même efficace. Elle avait, au moins, aucunement l’air d’une femme ; c’était suffisant.
Puis le moment de choisir un nom arriva. Un choix qui se fit rapidement et simplement, la travestie ayant probablement, sans doute, prit le temps d’y réfléchir avant. Un nom connu de tous, dont elle espérait, priait qu’en le portant, toute la force qui y était rattachée pourrait l’aider dans sa quête.



L’Ylisse, le monde qu’elle connaissait durant son enfance. Des plaines verdoyantes ; des villages, des villes entières dont la vie battait son plein. Arrivée dans le passé, Lucina pouvait enfin admirer toute la splendeur de ce qu’elle protégeait.
Les débuts furent difficiles. Tous étaient séparées, elle était seule ; et, sans avertissement, elle se retrouva en face de sa tante, Lissa, mais également son père, Chrom. Des retrouvailles à sens unique, dont elle ne put en profiter à leur juste valeur ; car elle n’était pas encore née, et l’image qu’elle renvoyait n’était pas la sienne, mais celle de “Marth”, un jeune homme mystérieux, semblable au Roi Héros.

Mais elle ne se découragea pas. Elle savait que, quelque part dans le monde, ses amis étaient là, et se battaient aussi. De même qu’elle avait confiance en son père, en ses capacités ; que son rôle principal à ses côtés, comme dans l’ombre, serait de veiller à ce que rien d’imprévu ne vienne le blesser mortellement dans son combat.

Les jours passèrent, enchaînant les événements importants ; l’attaque à Ylisstol, l’enlèvement d’Emmeryn ; la guerre contre Plegia, ajoutée à l’invasion de l’armée de Walhart … Avant même qu’elle ne puisse le réaliser, voilà qu’elle se retrouvait à combattre aux côtés de son père, de sa famille ; que ses compagnons du futur se joignèrent à eux, et que, tous ensemble, enfin, ils pouvaient se dresser contre Grima : leur ennemi juré.

Un combat perdu d’avance dans le passé ; tout cela pour que leurs chances de victoire dans le présent se voient doublées.
Garantissant leur futur à tous...


Le temps passait, et plus les jours s’écoulaient, plus les dernières traces du malheur qui se dessinait sur le monde s’effaçaient. Bientôt, Ylisse se verrait cicatrisé de toutes les guerres, toutes les pertes des dernières années. De longues années pour marquer l’histoire. Une histoire à laquelle Lucina avait participé : “Celle Qui Connaît Le Futur”. Un titre qui était relativement paradoxal pour la princesse. Le futur qu’elle connaissait était loin d’être celui qui s’annonçait.

Son père, sa mère, son frère étaient là. Elle aussi ; bien qu’encore un bébé, elle était là. Son devoir sera identique, mais beaucoup plus rayonnant … Oui … Le destin de l’autre Lucina était déjà décidé.
… Mais qu’en était-il du sien?


On lui accordait le droit de vivre en paix dans cette époque, ce monde, auprès de ses parents, de sa famille, d’elle-même. Elle le méritait ; après tant d’années, tant de loyauté pour ce monde, elle méritait cette paix pour laquelle elle se battait tant, cet amour qui lui était donné. Mais …

Même s’il s’agissait bien d’Ylisse, même si elle était acceptée, même si personne ne la blâmerait pour qu’elle profite de cette paix, qu’elle prenne un repos bien mérité … Au final, Lucina ne pouvait l’accepter. Partagée entre le droit de vivre dans une époque heureuse, et le devoir de restaurer une ère de désolation, Lucina n’hésita pas – ou plutôt elle ne s’accordait pas le droit d’hésiter.

Pas un seul au revoir, ni aucun avertissement. Lucina partit du jour au lendemain, sans laisser de traces, au milieu de la nuit. Seule son soi plus jeune pu entendre ses dernières paroles avant son départ : la promesse d’un avenir heureux.
Un passage de flambeau : pour le bonheur du peuple, l’amour de sa famille.


Cependant, sa quête vers l’accomplissement de son devoir fut très vite perturbée par un imprévu : être aspirée dans un monde totalement différent, inconnu à Lucina. Un monde dans lequel deux nations seraient en guerre, mais dont la vraie menace était un dragon n’y prenant nullement part. Et ce, par une personne encapuchonnée, dont elle ne pouvait rien apprendre de plus, si ce n’est un contexte très flou.

Un départ qui freina Lucina dans sa décision, il fallait bien l’avouer. Le doute l’envahissait dans un premier temps ; il lui fallut quelques temps pour que celui-ci se dissippe. Après tout, elle était, à présent, véritablement seule, sans aucun allié, ni repère.
Mais il lui restait encore quelque chose : Falchion ; souvenir de son père ; symbole de son titre, son rôle ; mais aussi ce qui lui était le plus fidèle au monde, ayant été à ses côtés durant les moments les plus difficiles. De même qu’elle avait fait la promesse à Tiki, prêtresse du dragon divin Naga, de faire honneur au nom de Marth qu’elle a porté pendant plusieurs mois, voire années.

Venir dans ce monde était alors comme une épreuve ; une épreuve pour voir si, véritablement, Lucina serait digne de son titre ; capable de venir à bout de tous ces obstacles.


Qui dit monde inconnu dit qu’il faut prendre des précautions. Lucina pouvait à présent être considérée comme une experte en la matière.
N’ayant pas eu le temps de préparer quoique ce soit, il lui était impossible de se déguiser – cela lui paraissait même inutile, le seul détail physique sensible pouvant être son oeil gauche : un masque ou un cache-oeil pouvaient largement suffire. Cependant, dévoiler son vrai nom pouvait poser quelques soucis. Elle souhaitait faire face au monde avec celui-ci, porter dignement le nom qui lui a été donné par ses parents. Mais, là encore, qui sait quelle attention lui serait accordée si son nom venait à éveiller des souvenirs dans l’assemblée générale.
Une longue session de réflexion s’ensuivit, durant laquelle la princesse cherchait un nom qui ait du sens ; pensant à des légendes, mythes, et autres symboliques diverses… Finalement, ce ne fut que lorsqu’elle arriva en bordure de mer, qu’elle eut une idée.


Un terme ancien, lié aux dauphins ; ces animaux pouvant avoir une symbolique particulière, importante à Lucina. Une idée qu’elle n’hésita pas à appliquer.
Delphis. Delphis.
Un nom qu’elle allait à présent utiliser pour protéger son identité, tant qu’elle ne connaissait pas elle-même ce monde.